mardi 1 juillet 2014

Tunisie : décryptage des images politiques de la semaine #2



"La mémoire ne stocke que les mots, les airs et les images, pas leur lien avec le présent."

Les pas perdus — Gilles Jacob 




IMAGE 1 : MC Nejib et DJ Chebbi





Date  : 24 juin 2014
Lieu : Congrès du Parti Ouvrier Tunisien (POT anciennement POCT)

Aller, disons les choses comme elles sont : Nejib Chebbi, le big boss du parti Al Jomhouri (ex-PDP), n'est pas un bon communicateur politique. Ses discours et ses interventions médiatiques sont souvent monotones et ennuyeuses. Pourquoi ? D'abord, il utilise exclusivement l'arabe littéraire alors que si on veut être compris par un peuple, il faut commencer par lui parler dans la langue qu'il comprend : edderja. 

Puis, son débit (c'est-à-dire le nombre de mot prononcés par minute) est lent. Un bon débit se situe vers les 140 -150 mots/minute. Chebbi est souvent dans les 100-120 mots/minutes. Ce qui a pour effet de lasser l'auditeur. Plusieurs autres défauts de communication mais nous y reviendrons dans les prochaines chroniques.

Cette semaine, Chebbi semble ajuster sa communication sur le discours. Et le résultat est réellement intéressant. Pourquoi ?
D'abord, il utilise edderja. Mais ça ne s'arrête pas là : il utilise un soundbites, c'est-à-dire un expression courte et accrocheuse "Ma innajmch ninsa" qu'il répète dans des moments précis pour créer un un rythme. Si bien, que son discours devient presque du Rap. 
Je me suis amusé à monter le discours de Chebbi sur le rap de Still Dre de Dr. Dre pour illustrer la rythmicité du discours. Enjoy, la musique démarre à la seconde 0:20.



IMAGE 2 : Indiana Essebsi : le bon coup de com. de Nidaa

source photo : Tunisie Numérique


Lieu : Nouakchott
Date  : 21 juin 2014

C'est un bon coup de com. politique pour Nidaa cette semaine. Cette photo porte un message électoral précis. Aller, voilà les dessous de l'affaire :
Selon les dernières études qualitatives, les citoyens tunisiens veulent que le prochain président soit :
Intelligent, fort, rassurant, intègre et — tenez-vous bien — il ne doit pas mêler pas sa famille et affaires d'Etat. Nous appellerons ça "le syndrome Trablesi". En sommes, un HOMME D'ACTION.

Et justement, cette photo communiqué à la presse montre BCE en homme d'action pour plusieurs raisons:

  • D'abord, la composition  : sur la photo ainsi cadrée BCE semble être le sujet central, donc le plus important  dans la composition. Il est également le sujet le plus en avant. Symboliquement c'est le meneur qui est suivi par ses troupes.


  • Ensuite, le look : on ne manquera pas de remarquer que BCE est habillé en casquette et en gilet. Un code  vestimentaire habituellement réservé aux hommes de terrain et d'action : humanitaires, reporters de guerre, chasseurs.
  • Enfin, le contexte :  La Mauritanie n'est pas la Suisse. C'est un pays dangereux qui est classé par les chancelleries occidentales comme l'un des pays à risque comme le Mali et le Nigeria. Le fait que BCE y supervise les élections lui donne une double légitimité : celle d'un homme d'Etat et celle d'un homme qui n'a pas peur du terrorisme pseudo-djihadiste tellement craint et répugné par une grande partie de l'électoral Nidaa Tounes à mon sens. 


IMAGE 3 : Marzouki hors-champ : la réponse du berger à la bergère

source : Masr al yawm


Date  : 26/ 27 juin 2014
Lieu  : Sommet africain de Malabo

Cette photo nous révèle la délégation égyptienne menée par le président A.F Sissi, filant comme un train. Rien de particulier jusque-là. Mais ce qui nous intéresse ici c'est ce qui se trouve hors-champ. Et c'est justement, notre président provisoire Marzouki le magnifique qui vient de se prendre un vent. Sissi fait mine d'ignorer Marzouki qui se trouvait sur sa trajectoire pour lui signifier son dédain. Pourquoi Sissi en veut-il donc à Marzouki ?
La réponse à ce mystère nous renvoi 24h plus tôt dans la salle de conférence de Sipopo, où se tenait la cérémonie d’ouverture du 23e Sommet des chefs d’États et de gouvernements de l’Union Africaine. 
Alors le président égyptien Abdelfattah Sissi donnait son discours Marzouki, le magnifique s'est fait remarquer en feuilletant des papiers durant tout le discours. Les caméra de télévision, ne l'a pas loupé et la diplomatie égyptienne non plus.


Marzouki durant le discours de Sissi








IMAGE 4 : Socrate, par delà les slogans 





source photo : Business News
Lieu : el Kef
Date  : 24 juin 2014

La quatrième image politique de la semaine est sans doute celle-ci. Elle nous révèle le monument à la mémoire de Socrate Cherni (lieutenant de la Garde nationale, tué par des terroristes à Sidi Ali Benaoun) vandalisé par des sympathisants de l'organisation terroriste Al Qaida et de Da3ech (l’État islamique en Irak et au Levant).

Si les slogans semblent être le point d'ancrage les plus relevé par les observateurs, il y a un autre point bien plus important à relevé : le drapeau tunisien noirci par la peinture. Ici, en couvrant de noir le premier symbole de la République,  les vandales ont voulu signifié  leur négation de la Tunisie en tant qu'Etat-nation, et en tant que civilisation unique pour marquer leur allégeance à une forme d'organisation trans-territoriale.


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